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Le jour où... J’ai fait goûter le gâteau patate partout dans le monde

Publié le 12 février 2011

Suite du périple de Nirina et Rodolphe, deux marmailles la kour revendiqués qui font le tour du monde depuis quatre ans, pratiquement sans budget. Carnet de voyage 19 : "Quel plaisir inestimable de voir ces hommes et ces femmes du monde entier se délecter de nos traditions gustatives réunionnaises ! Nous aurons préparé avec amour ce gâteau de patates douces de Miami à Osaka, de Barcelone à Bangkok, de Genève à Lisbonne..."

copyright : Rodolphe Sinimalé
"Nous avons été les premiers étrangers à fouler du pied l’enceinte de maison de famille japonaise. Un grand honneur, fêté comme il se doit par un gâteau patate en déssert !"

Journal des aventuriers – Entre Juillet 2006 et Décembre 2010 :

« La première fois que je l’ai rencontré – je devais avoir à peine 8 ou 9 ans – j’en suis littéralement et irrémédiablement tombé amoureux. J’étais pourtant si jeune ! Rien n’avait laissé présager d’une telle précocité. Mais avec sa couleur blonde et dorée, sa chaire tendre et douce et son parfum délicatement suave et vanillé, il n’a pas pu en être autrement. Ce fut un coup de foudre instantané, une empreinte dans le cœur marquée à jamais, une blessure volontaire et veloutée, inattendue mais désirée.

Puis les années passèrent et emportèrent avec elles l’âge tendre, cédant bien trop vite sa place à l’égoïsme et l’ingratitude. Je l’avoue volontiers et sans gêne aucune, je l’ai subitement délaissé, capricieux et décidé. Papillonnant vers des couleurs plus vives, des parfums inattendus et exquis et des saveurs encore inconnues – il m’est même arrivé plusieurs fois de sécher mes cours d’économie pour aller les rencontrer en secret – j’avais la sensation de vivre, d’être libre, d’exister. Je ne regrette rien, après tout : je n’étais qu’un jeune néophyte gourmand et curieux, et ces multiples expériences sensuelles et sensorielles allaient devenir la base de mon éducation de voyageur.

Enfin, par un beau jour de juillet 2006, nous sommes allés Nirina et moi, lui dire au revoir, peut-être même adieu. Amener sa petite amie avec soi peut paraître un peu vif et inattendu mais leur rencontre, quelques années plus tôt, avait été inévitable (Nirina l’aima instantanément, jusqu’au jour ou elle su. Elle s’inquiéta tant, vu mon attachement !).
Nous voila donc tous ensemble réunis une dernière fois (du moins c’est ce que je pensais). Nous nous asseyons autour d’une table en bois sombre pour discuter, mais c’est un silence pesant qui s’invite et s’installe. Le cadre magique de Salazie n’y change rien, pas même ces majestueux cumulus qui semblent rire de notre situation, pourtant pénible et difficile.

« C’est la dernière fois, c’est fini » j’avance, la voix tremblante et vulnérable.

Le souffle coléreux du vent des cirques se fait entendre et au loin, une porte claque violement son indignation. Nirina acquiesce, le cœur rempli d’amour altruiste et débordant de compassion. Elle me saisit par la main, à la vue de toutes et de tous, et même de notre invité impassible.
« Nous devons y aller maintenant. Finissons-en ! » lance-t-elle, comme pour soulager enfin cette trop longue agonie.

Gateau patate - copyright : Rodolphe Sinimalé
Des gêteaux patates Made in Chicago et... végétaliens !

Je revois une dernière fois son élégance intemporelle et sa tenue parfaite, sa blondeur presque safranée et ses reliefs dessinés. Puis, d’un coup d’un seul, je saisi une fourchette nonchalamment posée sur mon assiette et l’enfonce dans son cœur froid, décidé à n’en rien laisser.
Un étrange soulagement m’assaille. Je porte à ma bouche ce qu’il en reste, fragments inanimés des trésors du métissage réunionnais.
Nous partons sans même nous retourner, abandonnant le passé révolu et nos jeux d’adulte-enfant.

Aujourd’hui, nous quittons La Réunion, notre ile bien aimée et ses habitants, en route vers notre aventure mondiale ! Dans l’avion qui nous mène vers notre destin, je me fais une promesse sincère et authentique : lui rendre hommage dans le monde entier.
Oh toi mon beau et tendre gâteau-patates, ma famille, ma chair et mon sang ! Mon propre père t’a cuisiné maintes fois et te cuisinera, je l’espère, encore longtemps !

Une rencontre décisive allait pourtant remédier à ce destin tragique : la rencontre – par hasard et en Australie ! – de ce couple de Réunionnais eux aussi amoureux de ce mets fantastique et singulier. Teddy et Priscilla, puisque c’est leur prénom, possèdent même le saint Graal (Graal : « Objet d’une quête longue et souvent vaine ; Dogme ardu, impératif inatteignable », selon le dictionnaire Wiki) : une recette unique, magique et enivrante ; un élixir savant et ensorcelant, capable d’envouter une bande d’irréductibles Américains ou un groupe de Japonais urbains !

copyright : Rodolphe Sinimalé
Des Américains prêts à manger... dans la feuille banane avec les mains ! Le dessert suivra bientôt.

Quel plaisir inestimable de voir ces hommes et ces femmes du monde entier se délecter de nos traditions gustatives réunionnaises ! Nous aurons préparé avec amour ce gâteau de patates douces de Miami à Osaka, de Barcelone à Bangkok, de Genève à Lisbonne ! A chaque fois, la surprise (« Comment, un dessert avec des patates dedans ?) cèdera la place à une envolée d’exclamations rayonnantes et autres onomatopées joyeuses :

- « Hummm ! Oh My God ! This is just un-be-lie-vable ! Such an amazing taste ! »
- « O i shii des ne ! Gochisoosama deshita ! »
- « Es increíble ¡ »
- « é inacreditável... »

Si le sourire est une arme de communication massive, je cède volontiers ce secret pâtissier, d’une efficacité redoutable et maintes fois vérifiée, aux hôtes soucieux et aux voyageurs aventureux.

Aussi, Madame Jacqueline Farreyrol, ce secret des voyageurs planétaires et réunionnais permettez-moi de vous confier, avec respect et en toute humilité. Vous qui présidez l’IRT et qui n’avait pas voulu de ma « Facebook-amitié »(1) – sincère pourtant je l’étais ! - je vous le dévoile avec cordialité : si vous voulez des hordes de touristes séduire et attirer, des gâteaux de patates douces surprises faites donc cuisiner ! ».

1. En septembre 2010, les voyageurs ont envoyé une invitation à Madame Farreyrol pour les rejoindre sur Facebook, demande malheureusement restée vaine à ce jour…

copyright : Rodolphe Sinimalé
Mon père, de Sainte-Clotilde avec Katrina de Los Angeles et Gateau Patates, de La Réunion.

Gros plan sur… La patate douce : une amie et une alliée

Nous avons retrouve notre chère et douce patate un peu partout dans le monde, la palme revenant tout de même à la Nouvelle Zélande : les maoris la vénèrent ! Mais pour ce qui de sa préparation, nous n’avons jamais rencontre l’équivalent de notre local gâteau-patates. En Malaisie avec du lait de coco ou encore aux États-Unis durant Thanksgiving, la patate douce est à la cuisine ce que le maloya est à la musique : un trésor du patrimoine !

L’origine de la patate douce (nom latin : Ipomaea batatas) a longtemps fait l’objet d’âpres discussions opposant des savants du monde entier. Son origine sud-américaine ne semble pourtant aujourd’hui plus pouvoir être sérieusement contestée.

Bien que ses tubercules se préparent exactement comme ceux de la pomme de terre, la patate douce n’appartient pas à la même famille botanique : la pomme de terre est une solanacée tandis que la patate douce appartient à la famille des convolvulacées.

Mais c’est définitivement au goût qu’elles diffèrent : nettement plus sucrée en raison de sa teneur en glucides plus élevée, la patate douce offre en outre, sur le plan nutritionnel, des avantages supérieurs à ceux de sa cousine dans nos assiettes réunionnaises (teneur en bêta-carotène : 6 gr/100 g, en vitamine C : 23 mg/100 gr, en calcium : 22 mg/100gr).

La suite : la recette du gâteau patate

Lire aussi :
Aventuriers réunionnais de la mobilité : ils font le tour du monde…
- Episode 1 : Le jour où... Nous avons traversé le Japon sans un rond
Episode 2 : Le jour où… Nous avons fêté l’Independance Day à Chicago
- Episode 3 : Le jour où… J’ai fait une retraite dans un monastère bouddhiste thaïlandais
- Episode 4 : Le jour où… Nirina a fêté son anniversaire au Mont Cook en Nouvelle Zélande
- Episode 5 : Le jour où… Nous avons conduit un scooter à Saigon
- Episode 6 : Le jour où… Nous avons appris à faire des pizzas en Italie
- Episode 7 : Le jour où… Nous avons partagé des gâteaux dans la rue à Barcelone
- Episode 8 : Le jour où… J’ai dormi chez un chauffeur de taxi en Inde
- Episode 9 : Le jour où… Nous avons rencontré un couple de Réunionnais en Australie
- Episode 10 : Le jour où… Nous nous sommes faits arrêter par une fausse milice à Madagascar
- Episode 11 : Le jour où… Nous nous sommes faits arrêter par une fausse milice à Madagascar 2/2
- Episode 12 : Le jour où… J’ai rencontré ma famille mondiale (1ère partie)
- Episode 14 : Le jour où… Nirina partagea un moment lyrique
- Episode 15 : Le jour où... j’ai rencontré le maître de méditation américain Alan Wallace
- Episode 16 : Le jour où… J’ai visité le PIA Mind Centre en Thaïlande
- Episode 17 : Le jour où... j’ai rencontré Matthieu Ricard, moine bouddhiste et écrivain
- Episode 18 : Rodolphe et Nirina : plaidoyer pour le sourire
- Episode 20 : Le jour où… J’ai pris le temps de vivre à Madagascar
Aventuriers réunionnais de la mobilité : l’heure du retour- Les secrets du voyageur : sourires, réseaux et partage
Rodolphe et Nirina, l’interview

Joindre Rodolphe et Nirina : [email protected]


Rodolphe Sinimale is a traveler, meditation teacher and writer.
In 2006, he left his position and sold out every little thing to focus entirely on the spiritual path. His search has led him all over the world - from Madagascar to Vietnam, from New-Zealand to Japan, from USA to Thailand – in order to learn, to give and to share.

Rodolphe Sinimale holds a M.B.A in Human Resources Management, from the Paris Graduate School of Management, France.

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